jeudi 29 décembre 2011
mercredi 28 décembre 2011
BELA XXXI - Missive des Carpates
Chères âmes errantes,
Le Comte d'Arcy ne peut s’empêcher de vous faire partager le plaisir qu'il a de vous recevoir tous, bientôt, en son château; que cette soirée reste immortellement gravée dans la mémoire de chacun, et soit l'apothéose d'une année que nous achèverons ensemble au pied du château, impatient que nous sommes de rentrer dans l'année du Dragon.
Afin de lever toute ambiguïté, de brûler tout malentendu, le comte se permet de préciser les choses suivantes afin d'éteindre le feu de quelques incompréhensions persistantes:
-1- Le début des réjouissances est fixé à l'heure exacte de vingt heures et trente minutes
-2- La couleur rouge ne concerne que le côté culinaire de l'aventure;
-3- La soirée est costumée, mais n'allez pas vous ruiner; le thème vestimentaire est celui de la Transylvanie de Vlad Dracul III Tepes, prince de Valachie;
-4-Vous garerez vos fiacres à l'extérieur du château, près de l'église ou devant la mairie;
-5- Une participation vous sera demandée, une urne attendra donc vos enveloppes dans la cuisine, à vous de ne pas oublier votre obole; le montant sera connu la veille, en fonction des frais engagés et vous sera communiqué par email, afin que chacun puisse préparer son enveloppe avant la soirée et la glisser dans l'urne en toute discrétion.
-6- Le comte d'Arcy décline toute responsabilité quant aux traumatismes visuels et spirituels que pourrait engendrer la soirée dans l'esprit des plus jeunes.
Vous souhaitant les meilleurs préparatifs,
D'Arcy
mardi 27 décembre 2011
MARQUISE JOSETTE DE MARESCHES
Du fond de la banquette, la femme attend, longuement, impatiente de se faire ouvrir la porte, désireuse de se laisser piéger par la froideur du temps.
Le voyage, se persuada-t-elle, fut long, ennuyeux, infini, du fait d’un fiacre miteux répétant sans cesse les boucles d’un éternel lacet, donnant aux plaines environnantes l’image d’un corsage imaginaire tendrement poser sur une peau entaillée.
Sa tête lui parait sortir tout droit du royaume des songes. Ses membres, quant à eux, semblent résister à l’appel de l’évidence, comme tentant de nier leur existence propre, persistant dans un domaine inconnu d’apesanteur, de chimères, de légèreté, d’inconscience. « Le froid, pensa-t-elle, seul le froid réveillera ces appendices difformes dont je ne sais que faire. »
De sa main droite, gantée d’une dentelle ivoire ajourée de larges pâquerettes, révélant à la vue une peau blanche, écaillée, et dans une lenteur lunaire, elle écarte poussivement le rideau jaunie de l’unique fenêtre du fiacre, et patiente, tentant de contempler une bâtisse tant contée, plissant délicatement les yeux pour affiner sa vue. Ne parvenant pas à percer l’épais rideau de brume, elle repousse sa pince de chair, laisse retomber le voilage, assombrissant de nouveau l’habitacle.
Soudain, des pas se font entendre dans l’allée du château. Brusquement, la porte s’ouvre dans un étrange grincement, figeant la vue, l’ouïe, le temps. Il semble qu’un extravaguant ballet de froides entités attire la femme au dehors, l’invite à poser pied sur le succinct chemin de pierres brunes, unique repère de cette ténébreuse crypte. Promptement, une main crasseuse apparaît dans ce cocon de bois, tendue vers la femme qui ne s’oppose pas à la prendre. De cet opaque brouillard blanchâtre, posant les pieds sur la marche puis sur le sol glacé, se dévoile une silhouette toute de rouge vêtue, tenant de sa main droite perlée le mince bras squelettique de Furtus. La porte se referme, sans que quiconque n’ait initié le mouvement. Le cheval, au dehors, expire de ses narines élargies un large panache de vapeur. La marche débute.
Au pied de la porte de la demeure, Furtus tire délicatement la liaison, faisant tintinnabuler une timide cloche. Quelques secondes plus tard, la porte de bois s’ouvre sur la femme, révélant la lumière et la chaleur d’un enfer à présent convoité.
« A qui ai-je l’honneur ? », s’interroge le grand homme, mélancoliquement vêtu.
« A Madame Rose, Monsieur », rétorque faiblement le cocher.
« Et bien, Madame, entrez… ».
La femme entre, suivi du cocher. La porte se referme. Les ténèbres tombent de nouveau sur le parc, figeant le temps dans une noirceur moite et lugubre.
- - - - -
Comte,
La réponse de Madame Rose, fournie (ci-dessus) hier soir, fut une réponse hâtive de sa part, fruit d’une euphorie résultant d’un jour de fête en famille.
Cependant, en ce matin couvert, Madame Rose a contacté son cocher, à l’aide d’un petit message glissé à la patte d’un volatile fort bien éduqué. Se rendant compte de la fatigue qui accompagnait un lendemain de Noël, son voyage du 31 est décommandé.
Furtus arrivera donc au château, le fiacre vide, la porte ouverte sur le vide d’un soir.
Furtus (Etienne)
SECONDS-RETOURS
Nous ne serons pas présents au réveillon.
Bonnes fêtes de fin d'année !
Ghislaine
bonjour et bon noël,
je serai parmi vous pour l'arrivée de la nouvelle année.
Je pourrais m'occuper du dessert ; as-tu un congélateur? car j'habite près de chez PICARD et j'ai vu des glaces aux fruits rouges (vacherin, charlottes..).
Je serai seule (1 personne), Marie-Lou me tient au courant des événements.
A bientôt
Cathy
je ne serai pas présente; je passe le réveillon avec mon ami Jacques
Bonnes vacances et à bientôt,
Myriam
Je viendrais seule par les chemins malsains jusqu' à votre demeure la lanterne à la main éclairer votre destin.
Equinoreve (Véro)
Bonsoir Mr D’Arcy,
Selon miss Elizabeth vous avez toutes les qualités qu'on apprécie chez un jeune homme vous êtes, je cite "plein de sens, de bonne humeur et d'entrain. Je n'ai jamais vu à d'autres jeunes gens des manières aussi agréables, tant d'aisance unie à une si bonne éducation."
Si votre invitation au pic nic est toujours d actualité, nous nous ferons mon mari mes enfants et moi même , un plaisir de nous joindre a vous, et si dans quelque mesure que ce soit nous pouvions contribuer par notre aide a ce que cette soirée soit parfaite, n’hésitez pas a nous le faire savoir et nous nous ferons un devoir de nous exécuter. Dans cette attente recevez cher comte tous nos sentiments les plus dévoués et sans préjuges.
Famille Pottier
Merci Xavier pour l'invitation, mais comme je te l'avais dit la dernière fois, je ne pourrai être présent.
En espérant que vous passiez une bonne soirée.
A bientôt.
Philippe
samedi 24 décembre 2011
PREMIERS-RETOURS
En respectant l'ordre d'apparition:
Je te souhaite ainsi qu'à tous ceux qui te sont chers de belles et bonnes fêtes de fin d'année et notamment un bon réveillon festif, convivial, théâtral...
Cela sera toutefois sans nous.
A l'année prochaine,
Cela sera toutefois sans nous.
A l'année prochaine,
Dominique
Mon ami,
Je vous confirme par ce mail la présence de la famille Henninot (4 personnes)... Je serai attentif à vos mails et aux messages sur le blog...
Bien à vous,
Bien à vous,
Cédric
Salut mon Lapin !
Malheureusement et comme tu le sais, j ai quelque chose de prévu déjà et je ne pourrai participer à votre petite fête!! J'aurai une grosse pensée pour vous le 31 au soir, alors fêtez cela dignement et attention à notre Josette, soyez doux et tendre avec elle!
Au 6 janvier mon Lapinou et bonsoir a Madame! ;-)
Laurent
Un de vos chers amis, un certain Vlad Tepes je pense, m'a fait connaitre votre "Autre", votre reflet, cet être emprisonné dans un miroir... Ou alors, ce sont nous qui sommes prisonniers, et vous qui jouissez de votre liberté, de l'autre côté du miroir...
Les sabots claquent sur le sol dur, gelé. Les roues, perdant de leur circularité suite à de longs voyages dans les plaines sombres alentours, entrainent sur de lourds pavés de pierre, un étrange convoie.
La brume, épaisse, pesante, s’estompe, révélant, tel un mirage, une large bâtisse brune, entourée d’étranges lueurs flamboyantes, bouts de mèches de larges cierges entourés d’une aura solaire, feux follets d’âmes en partance, ou ne sachant quitter limbes.
Je relâche prestement les rênes de mon animal, je descends de mon menu fiacre, faisant craquer le bois détrempé. Je pose un pied sur le sol glacé de l’hiver. De ma bouche s’évapore un large nuage de fumée, blanchâtre, ineffable. C’est mon âme qui fui un corps qu’elle ne supporte plus. Je m’empresse de me couvrir l’orifice du peu de tissu qu’il me reste sur le dos. Mon âme, c’est tout ce qu’il me reste.
Ma démarche est bancale, mon visage est étrangement pâle et je souris peu. Je tiens à la main droite une fine bougie de cire, à la main gauche, un long chapelet de bois de cerisier et sur le dos, de larges habits noirs, usés, troués. Si la compagnie d’un vieux cocher vous intéresse, c’est avec grand plaisir que je me laisserai ouvrir les lourdes portes du château. Ne faites pas attention à mon accoutrement. L’habit, dit-on, ne fait pas le moine. Et les apparences sont souvent trompeuses. Ainsi, j’aurai l’honneur de rencontrer mon Maître, l’Empaleur, à la sortie d’un mystérieux corridor, si celui-ci n’est pas sortis, en soif de sang frais…
Mon cheval s’essouffle. Ce n’est pas le temps de faiblir. Il reste du chemin à parcourir. A samedi, si les roues tiennent jusque-là.
Furtus, Cocher de l’Imaginaire, pour vous servir. (Etienne)
Le 23 décembre 1888, Vincent Van Gogh est retrouvé dans son lit, à Arles, avec le lobe de son oreille gauche tranché. Selon le témoignage de son ami, le peintre Paul Gauguin, il se serait mutilé avec un rasoir sous l'emprise de la folie. Cependant, une théorie récente avance que ce serait Gauguin, également maître d'armes, qui aurait tranché au sabre l'oreille de Van Gogh au cours d'une dispute. Ce dernier l'aurait ensuite couvert vis-à-vis de la police...
L'an dernier nous avons passé le réveillon chez Josette. Il avait été convenu que chacun s'occupe de quelque chose pour le repas, entrée, fromage-salade, boissons, dessert, cotillons, etc...... Josette s'occupant du plat principal. Nous avons additionné toutes les dépenses, divisées ensuite suivant le nombre de convives.
Auriez-vous de votre côté, pensé à quelque chose de précis pour le buffet, Monsieur des Esseintes ?
Aymelle (Marie-Lou)
Sans orgueil et sans préjugés,
loin de mes cinq cousines dont les différences font tant pleurer le serein père et l'idiote mère,
je serai heureuse de m'avancer sur les chemins sombres qui mènent à vous avec mon cavalier pour cette folle nuit du 31.
A bientôt, mon cousin, pour les préparatifs du pique nique.
Emma d' ARCY (Yannick)
vendredi 23 décembre 2011
BELA XXXI - Episode 01
‘Et tâchez d’être à l’heure…’
Je dois bien convenir que l’entrée en matière est abrupte ; l’indice temporel demeure vague, semble lointain. Mais il me faut bien débuter cet appel d’une manière ou d’une autre, et je préfère de loin les entrées en matière raides, parfois même sans complaisance ; elles permettent de ceinturer l’attention, en l’occurrence la mienne, et semblent ainsi placer sur l’horizon un point dont je devrais alors m’efforcer, sinon de m’en rapprocher, en tout cas de ne pas perdre de vue. Je ne saurais exprimer très exactement les raisons qui me poussent à avoir accepter la demande du Comte d’Arcy de prendre contact avec vous, si ce n’est celle évidente de lui rendre service; ni pourquoi je l’ai rejoint aussi vite pour passer les fêtes de fin d’année avec lui… les raisons se présentent à moi comme autant de pistes pour lesquelles je n’ai pas pris le temps de comprendre, ni leurs origines, ni leurs directions. Avais-je anticipé la nécessité, désormais évidente maintenant que je suis sur place, de ne pas laisser fuir dans le vague oubli tout ce que je risquais de ressentir ici ? Avais-je anticipé une dimension dramatique liée à l’appel du comte, et voulais-je rendre hommage à cet homme en me missionnant pour me consigner comme seul récipiendaire de ses pensées ? Avais-je deviné par avance qu’il me cantonnerait au rôle de celui qui sait écouter et qui, dès lors, écoute, sans juger nécessaire d’engager ni débat ni polémique, permettant alors à celui qui veut s’exprimer de le faire dans la qualité, les idées émises ne décrivant que des boucles qui reviennent vers soi-même ? Ne savais-je pas en fait très exactement que le comte comptait sur moi pour tenir ce rôle, et ne savait-il pas que je le savais, puisque la finesse de nos esprits avait eu maintes occasions, par le passé, de nous rapprocher, notre compréhension mutuelle menant parfois à d’inavouables frissons, l’amitié entre Albert et Herminien se faisant métaphore de la nôtre, le château du comte se fut-il trouvé à Argol et non Ruesnes ?
Il m’apparaît pour l’instant, que dans la solitude d’un château où sa propre solitude fut si brutalement imposée à mon ami, il s’avéra salvateur qu’il ne posséda aucune arme à feu. D’Arcy eut-il été mortel, bien évidemment… Le 31 décembre prochain, à une heure que l’on ne saurait considérer comme tardive, mais quand le soir s'effondrera sur le château, entre 20H et 21H, Le comte d’Arcy vous fait savoir qu’il attendra d’entendre vos fiacres se parquer autour de l’église, qu’il attendra d’entendre le bruit de vos pas crisser dans la neige, cette dernière aurait-elle la bonté de se joindre à nous. D’Arcy nous convie tous à la soirée BELA 31, et vous saurez vous fondre dans le décor des Carpates pour respecter la thématique que les origines de notre ami nous impose.
Vous ne me laisserez pas seul face à l’organisation de l’événement ; et ce site permettra à chacun d'y aller de sa prose et de déposer ses commentaires. Néanmoins sachez qu'en ce qui concernera la restauration, le rouge s’impose, qu’il s’agisse des boissons ou du repas. Vous ferez donc preuve d’imagination.
Je ferai le point quotidiennement ici ; revenez donc bientôt, car nul ne maîtrise réellement la vitesse d’évolution de certaines choses…
Des Esseintes
mercredi 15 juin 2011
BOUTURES
Un tiers de terre, un tiers de tourbe, un tiers de sable, des rameaux de dix centimètres, ne garder que les six premières feuilles, enrober la tige d'hormone de bouturage, enfoncer et tasser, arroser fréquemment, attendre longtemps.
vendredi 22 avril 2011
mardi 19 avril 2011
LA GUERRE DE SEPT ANS
Ce n’est que lorsque l’on tranche soi-même le fin fil de la fin, que les autres comprennent enfin que c’était la fin. La lenteur des idiots. Dire que j’en faisais-je partie. Sourias-tu ?
Quelques jours, quelques semaines.
Vulcain, Titanic, nom propre glacé flottant vers l’arctique.
Dans ce vent -qui m’exclut- du départ –pour m’inclure-.
Ne plus revenir, ne plus regarder en arrière ;
ne plus regarder en avant.
Regarder les pieds des mains des livres.
Tout est écrit.
La vie au travers des caractères d’imprimerie.
samedi 19 mars 2011
DATE DE NAISSANCE
D’Arcy sent ses doigts qui tremblent, ce matin. La vibration de ses carpes, de ses phalanges, de ces petits univers délicats faits d’osselets et de chair ne résulte pas d’une quelconque dépressurisation crânienne ; la température est juste un peu froide dans la bibliothèque, un fait très commun -donc habituel- à ce long tapis de jours déroulé sur la Sibérie temporelle reliant octobre à mai. Les mains de D’Arcy ne lui semblent pas vieillir ; il les regarde comme son frère regardait les siennes, mais sans l’inquiétude de ce dernier pour les marques d’usure qu’y creusait le temps. D’Arcy l’imagine parfois, assis dans son Voltaire, les yeux portés sur ses mains, d’un simple regard regardant, figé puis s’évanouissant dans l’interstice qui s’autorise furtivement entre le constat et sa formulation. D’Arcy, livre en main, relit cette phrase hasardée par Mishima un soir de cette semaine avant qu’il ne trouve le sommeil : « …en passant sous les becs de gaz de Toriizaka, il étendit les mains à la lumière. Il fut frappé de voir la pâleur de leur dos, car il se rappelait avoir naguère entendu dire que les malades qui vont mourir ne cessent de regarder leurs mains… »
D’Arcy cherchait sa date de naissance, ce matin. Parmi toutes ces photos mentales qui dérivent à la surface stagnante des marécages du passé, attendant d’être appelées pour venir ternir un peu plus le quotidien, D’Arcy s’est revu, pleurant dans les toilettes d’un restaurant d’une chaîne de restaurants, près d’Annecy, lors d’un quelconque repas pris à midi avec un troupeau de collègues. Quelques mois après le départ de son frère, en rentrant dans ce restaurant, la chanson diffusée pour l’accueillir lui parla d’un autre monde… oui, lui conseillant de rêver d’un notre monde, oui … mais… la terre est bien ronde… et la lune est si blonde…
Il est fort probable que D’Arcy naquit dans les toilettes d’un restaurant dans la violente rencontre de deux mondes, celui en contraction de son frère, et le sien, en question. D’Arcy s'est façonné des résidus propulsés dans l'espace sans gravitation d'après carambolage, gigantesque et immobile dans le vide du temps et de l’espace; artiste et son modèle à la fois, il prend entre ses doigts les météorites résiduelles, recomposées, éparpillées et migrantes autour de lui pour les sculpter en forme de cubes comme ceux de ces jeux anciens proposant plusieurs paysages à reconstituer.
Il y a plusieurs années de cela.
Ses paysages préférés seront évoqués. Une autre fois.
Disons que, comme disait Sartre en évoquant Baudelaire… « il est mort dès 1846. Ensuite il s’est survécu… il a choisi d’avancer à reculons, tourné vers le passé, accroupi au fond de la voiture qui l’emporte et fixant son regard sur la route qui fuit… »
samedi 5 mars 2011
TU VERRAS, D'ARCY...
Tu verras, D’Arcy, un jour il sera magnifique ton château. Le jour où la brume s’y installera, définitive, en couches harmonieuses et délicates, de cette même texture que celle que tu cultives dans ton cerveau. Tu verras.
Tu verras, D’Arcy, il fera bientôt beau, la chaleur naturelle te rendra ta chaleur corporelle, moins cette moiteur enlisant les corps qui patientent au caveau.
Sans peines, pas même celle qui se dit perdue.
Tu verras, D’Arcy, elle finira par partir. Tu pourras enfin te noyer dans la solitude enivrante du silence que l’on construit, produit, et détruit seul.
Tu verras, D’Arcy.
Tu verras que l’ennui s’installera enfin; quand les services fiscaux arrêteront de se rappeler de ton adresse, quand son absence deviendra une constante, quand tu n’auras plus les pieds gelés, quand tu pourras éponger tes dettes privées. Quand tu feras comme tout le monde : ne plus te soucier de l’humanité.
Tu verras D’Arcy, ce bonheur de te coucher ce soir avec les Neiges de Printemps, même si tu es fatigué de toi, de cette tête, de ces doigts. Tu verras, D’Arcy.
Tu verras D’Arcy ; ne pense surtout pas, non, ne pense surtout pas que tu as déjà tout vu. Tu souris..., oui, je te sens sourire ; … ; mais tu ne mets pas de mot sur ça.
mardi 1 mars 2011
[C.-F. VOLNEY] [Les ruines] [1791]
INVOCATION
Je vous salue, ruines solitaires, tombeaux saints, murs silencieux ! c'est vous que j'invoque; c’est à vous que j'adresse ma prière. Oui! tandis que votre aspect repousse d’un secret effroi les regards du vulgaire, mon coeur trouve à vous contempler le charme des sentiments profonds et des hautes pensées. Combien d’utiles leçons, de réflexions touchantes ou fortes n'offrez-vous pas à l'esprit qui sait vous consulter! C'est vous qui, lorsque la terre entière asservie se taisait devant les tyrans, proclamiez déjà les vérités qu'ils détestent, et qui, confondant la dépouille des rois avec celle du dernier esclave, attestiez le saint dogme de l’Egalité. C'est dans votre enceinte, qu'amant solitaire de la Liberté, J'ai vu m'apparaître son génie, non tel que se le peint un vulgaire insensé, armé de torches, et de poignards, mais sous l'aspect auguste de la justice, tenant en ses mains les balances sacrées où se pèsent les actions des mortels aux portes de l’éternité.
0 tombeaux ! que vous possédez de vertus ! vous épouvantez les tirants : vous empoisonnez d'une terreur secrète leurs jouissances impies ;ils fuient votre incorruptible aspect, et les lâches portent loin de vous l'orgueil de leurs palais. Vous punissez l'oppresseur puissant ; vous ravissez l'or au concussionnaire avare, et vous vengez le faible qu'il a dépouillé ; vous compensez les privations du pauvre, en flétrissant de soucis le faste du riche; vous consolez le malheureux, en lui offrant un dernier asile; enfin vous donnez à l’âme ce juste équilibre de force et de sensibilité qui constitue la sagesse, la science de la vie. En considérant qu'il faut tout vous restituer, l'homme réfléchi néglige de se charger de vaines grandeurs, d'inutiles richesses: il relient son coeur dans les bornes de l'équité ; et cependant, puisqu'il faut qu'il fournisse sa carrière, il emploie les instants de son existence, et use des biens qui lui sont accordés. Ainsi vous jetez un frein salutaire sur l'élan impétueux de la cupidité ; vous calmez l'ardeur fiévreuse des jouissances qui doublent les sens ; vous reposez l'âme de la lutte fatigante des passions; vous l'élevez au-dessus des vils intérêts qui tourmentent la foule; et de vos sommets, embrassant la scène des peuples et des temps, l'esprit ne se déploie qu'à de grandes affections, et ne conçoit que des idées solides de vertu et de gloire. Ah! quand le songe de la vie sera terminé, à quoi auront servi ses agitations, si elles ne laissent la trace de l'utilité ?
0 ruines ! je retournerai vers vous prendre vos leçons ! je me replacerai dans la paix de vos solitudes ; et là, éloigné du spectacle affligeant des passions, j'aimerai les hommes sur des souvenirs; je m'occuperai de leur bonheur, et le mien se composera de l'idée de l'avoir hâté.
dimanche 27 février 2011
LITTERAE -[I]
Cher vous,
"Le Bois" D'Arcy, le créateur de Brumes, mais bien sûr, c'est ce que j'avais perçue !!! Ce magnifique rêve de métamorphose immédiate d'un lieu au gré de son humeur. Pour se faire, il fallait bien un écran de brume, celui de l'Enchanteur pour mener la barque sur le fameux rubicon.
Un écran qui permet de promener ses invités le temps d'un voyage outre la rigueur de l'espace-temps. C'est ce que me procure vos "mots" ou "maux" je ne sais plus les différencier.
Un jour, on ouvre la porte de la demeure et on trouve là, la folie baroque qui s'enchevêtre dans de lourdes tentures et des chandeliers incendiant le moindre recoin de pénombre d'une lueur rougeoyante et faste; un jour la douceur des bleus clairs au plafond qui repoussent les insectes, les mauvais rêves et le désespoir; un jour orangé à la flamme; un jour en gris ou l'intérieur devrait avoir des airs de cachot avec de lourdes portes de métal et d'acier ascète, un jour vert où tout doit être parfait, frôlant l'alchimie, de la fraîche luminosité, mêlé de citron et de romarin, tout, jusqu'à la musique de la nature...c'est le concept de votre son et lumière très Cher !!!
L'idée de se donner le tournis me fascine. Cela me rappelle les rondes incessantes quand enfant, je tournoyais avec un majestueux tilleul autour duquel mon grand-père avait posé les quatre points cardinaux (une disposition de quatre pierres plates, mon Stonehenge à moi !) Ah ! Le parfum du tilleul, le soleil sur la peau ... Il y a une sensation de richesse et de dénuement total, une sensation de liberté et d'appartenance à la nature, peut-être ce que certains croyants appellent "la communion". Ces moments se font trop rares dit "L". A part chez les druides, les indiens ou les Dieux ! Cela dit, je n'aurais pas l'outrecuidance de me prendre pour l'un d'eux.
Bien à vous,
Louise du Viviay
CADAVRES D'AUTOMNE
La nature trompe l’ennemi; les grands arbres agitent leurs branches élastiques pour mieux étaler sous mon regard l’absence de feuillage; mais derrière ces éclaireurs semblant agiter le drapeau blanc de la trêve hivernale, certains corps d’armée se trahissent: les perce-neiges dissimulent bien mal leur présence, tandis que quelques primevères jaunâtres sont déjà en position; et que dire de cet intrus, cet œillet orange dont la présence restera un mystère.
Soit ! vous voulez la guerre, et bien vous l’aurez ! Les mauvaises herbes pensaient encore pouvoir se faire ignorer quelque temps, mais prêtes à l’assaut au bord de leurs tranchées, j’ai ouvert le premier les hostilités, d’une main précise et impartiale, retournant contre les premières lignes de l’envahisseur l’embuscade qu’il se préparait à me tendre. La vigilance se devra désormais d’être de tous les instants : l’ennemi est à découvert.
Dans les mois qui viendront, le combat acharné se déroulera au gré de mes temps morts.
En ce dimanche, j’ai entassé les derniers cadavres d’automne; je prépare le terrain; je suis l’architecte du champ de bataille d’un conflit perdu d’avance.
mardi 22 février 2011
CONSTRUCTIONS
Un parc en naissance, patûre à chevaux lors d'un passé récent, et qui fut autrefois un parc comme aurait aimé à s'y promener Madeleine de Scudéry; un château partiellement en ruine, que l'on qualifiait autrefois de 'temple du goût'; ce qu'il reste d'un homme, sous certains aspects en naissance lui aussi, en patûre à certains endroits, en ruine bien évidemment. D'Arcy entreprend depuis quelques dizaines de mois la mise en correspondance de la chair, de la pierre et du règne végétal, dans le secret désir que les trois se confondent et disparaissent dans le regard; que l'on prenne un saule pour le château, comme un promeneur pourrait le prendre pour un nénuphar, lui même ne pouvant être pris pour autre chose que le château. La réalité n'étant qu'un point de vue, qu'une vue de l'esprit, D'Arcy emploie ses songes et ses heures restantes à concrétiser de ses propres mains sa vision de sa réalité. D'Arcy se moque d'une façon alarmante de ce que les autres peuvent voir. Ne l'intéresse aujourd'hui que ce que lui peut voir, que quelques rares âmes peuvent apercevoir. Au hasard.
D'Arcy s'attache à créer deux univers superposés et en miroir, par un jeu de constructions dont lui seul détient les clefs. Les formes, les matières et les couleurs qui l'environnent participent à la construction interne de D'Arcy, donc à l'agencement externe de son environnement proche. L'univers extérieur n'existe que parce que D'Arcy existe, et ces deux univers sont autonomes et surjectifs l'un vers l'autre. Cette notion de réciprocité dispersée est cruciale pour la multiplication des constructions au sein des deux univers. Les constructions externes sont dès lors évolutives, mais rarement déviantes, puisqu'elles émanent de la construction interne de D'Arcy et reviennent l'alimenter. Les constructions externes communiquent entre-elles par souci d'esthétique et d'homogénéité, et peuvent se diviser en deux domaines d'intervention distincts: la structuration des espaces, et la décoration symbolique. Le parc du château, le mur de la montée d'escalier, bien que deux lieux géographiques différents, se prêtent aux deux domaines d'intervention, sans distinction. Une image qui pourrait illustrer cette explication est celle d'un puit entouré de flaques après une grosse averse.
D'Arcy sourit.
D'Arcy s'attache à créer deux univers superposés et en miroir, par un jeu de constructions dont lui seul détient les clefs. Les formes, les matières et les couleurs qui l'environnent participent à la construction interne de D'Arcy, donc à l'agencement externe de son environnement proche. L'univers extérieur n'existe que parce que D'Arcy existe, et ces deux univers sont autonomes et surjectifs l'un vers l'autre. Cette notion de réciprocité dispersée est cruciale pour la multiplication des constructions au sein des deux univers. Les constructions externes sont dès lors évolutives, mais rarement déviantes, puisqu'elles émanent de la construction interne de D'Arcy et reviennent l'alimenter. Les constructions externes communiquent entre-elles par souci d'esthétique et d'homogénéité, et peuvent se diviser en deux domaines d'intervention distincts: la structuration des espaces, et la décoration symbolique. Le parc du château, le mur de la montée d'escalier, bien que deux lieux géographiques différents, se prêtent aux deux domaines d'intervention, sans distinction. Une image qui pourrait illustrer cette explication est celle d'un puit entouré de flaques après une grosse averse.
D'Arcy sourit.
La relation entre les constructions internes de D'Arcy et les constructions externes à lui doit être assez dense pour générer une sensation, mais se doit d'échapper aux inquisiteurs de passage et autres touristes de sa vie.
Chaque construction externe doit avoir une légitimité à exister dans les deux univers, interne et externe, et doit, pour imager, s'énoncer comme corps en suggérant un esprit. Cette légitimité est la clef de voute du rébus du site, elle garantit l'équilibre de chacun des univers de constructions pris à part, mais de surcroit solidifie et garantit la relation des thèmatiques de construction intermundia. Cette légitimité assure les lignes de la matrice et la densité du maillage dans la superposition des univers recherchée, rendant possible, entre les mailles, une émergence poétique bien loin dêtre fortuite. D'Arcy se veut créateur de brumes.
L'univers global des constructions externes englobe la totalité de la propriété.
La philosophie qui soutient le maillage des constructions internes et externes se résume dans une seule phrase de Fernando Pessoa parlant de lui-même: -il assurait avoir ainsi créé un intérieur 'qui garantisse la dignité de son ennui'-. Cette phrase fait acte dans les deux univers de construction, elle en est le liant philosophique.
L'univers global des constructions externes englobe la totalité de la propriété.
La philosophie qui soutient le maillage des constructions internes et externes se résume dans une seule phrase de Fernando Pessoa parlant de lui-même: -il assurait avoir ainsi créé un intérieur 'qui garantisse la dignité de son ennui'-. Cette phrase fait acte dans les deux univers de construction, elle en est le liant philosophique.
D'Arcy ne donnera pas d'exemple, cela permettra d'éloigner les premiers touristes.
lundi 21 février 2011
LA BARQUE DU PONTON 40
Avec ces quelques années de plus qui ne sont pas encore suffisantes pour se sentir approcher de la cinquantaine, mais qui marquent déjà l’éloignement du ponton numéro quarante ; tout comme à l’instant où la main rapatrie le morceau de corde qui interdisait à la barque de s’éloigner de l’embarcadère, et qu’après un examen, pourtant bref et inconscient, de cette corde que l’on trouverait plutôt courte -constat sans conséquence et qui n’appelle aucune analyse particulière- on relève les yeux, la lente dérive de la barque semble alors, désormais libérée, et sans vraie perspective à laquelle se raccrocher, inquiétante de rapidité.
D’Arcy n’a pas peur de la mort ; peut-être attend t’il de cette assurance un effet placebo. Ce qu’il redoute par-dessus tout, c’est d’avoir atteint le ponton quarante sans douter de l’atteindre, et de le voir s’éloigner déjà sur des eaux incertaines où nombreux et inattendus sont les naufrages, qu’il s’agisse d’une défaillance du corps, cardiaque ou rupture d’anévrisme, d’une attaque contre son corps, cancer ou autre cadeau empoisonné, ou banal et pire, d’une rencontre mal inspirée avec une barque en contre-sens. D'Arcy ne s'inquiète pas de devoir partir, il veut néanmoins s'être comblé l'esprit de manière qualitativement suffisante avant de le faire. Et il lui apparaît comme une évidence qu'il ne peut-être que le seul à se forcer à le faire au moment où l'évidence du départ sera mise en évidence.
D’Arcy entend couler au bon moment, et celui-ci saura s’indiquer à coup sûr, car D’Arcy a toujours un œil sur les signes potentiels -aujourd’hui inexistants- et annonciateurs de son apparition. D’Arcy a encore faim de sa vie, mais n’ambitionne pas de s’en laisser dicter la fin par l’horloge biologique du vieillissement. D’Arcy respirera tant qu’il saura remplir les trois conditions suivantes : la première, que ce que lui apporte son esprit supplante la dégénérescence de son corps ; la seconde, qu’il sache trouver des aliments comestibles pour son esprit, le tout en remplissant la condition troisième de trouver encore enrichissant de s'enrichir l'esprit.
Pourtant, D'Arcy est également prêt à couler de manière impromptue, si tel en décidait une variation cancéreuse de l'un de ses organes; prêt à partir à une seule condition, la condition zéro, condition dont le contenu se dévoilera une autre fois.
Pourtant, D'Arcy est également prêt à couler de manière impromptue, si tel en décidait une variation cancéreuse de l'un de ses organes; prêt à partir à une seule condition, la condition zéro, condition dont le contenu se dévoilera une autre fois.
La tâche quotidienne que s’est fixée D’Arcy est donc finalement assez simple en soi: flotter sur l’eau, sans ramer, en s’imaginant voguer sur une toute autre étendue d’eau, les yeux mi-clos. Il aimerait bien les fermer, mais d’autres barques environnantes se doivent encore d’être surveillées et guidées pour certaines, ménagées pour d’autres, épargnées pour d’autres encore…
dimanche 20 février 2011
samedi 19 février 2011
REPRISE
Je reprends l’écriture ce jour. Nous sommes le 19 février ; vous et moi sommes le 19 février 2011. Je suis le 19 février 2011. La langue française possède ses tournures de charme, ses incompréhensibilités d’usage.
La date n’apporte rien à l’affaire. Le 19 n’est que le jour de ma naissance, en un autre mois, comme il est celui de la fille de ma seconde ex-femme, en un autre mois.
J’avance, non sans raisons, et celles que je m’avance sont multiples ; pourtant, combien d’entre elles sont vraies ? Sont-elles les causes de l’envie, ou viennent-elles la justifier à posteriori ? S’agit-il (réellement) de remettre en route une dynamique de l’esprit avant de reprendre l’écriture d’un roman (réellement) abandonné en bord de mer ? S’agit-il (éventuellement) de reprendre contact avec moi-même pour collecter et étudier les coquillages (éventuels) qui sont venus se fixer aux bottes de celui que j’ai laissé debout sur le sable ? S’agit-il de me laisser une trace ? S’agit-il (une nouvelle fois) de me faire du bien sous l’emprise de l’écrit, mais plus loin (désormais) de préserver mon esprit du naufrage inévitable dans l’oral, ces vaguelettes inconsistantes sur la houle feinte et terne du quotidien translucide ? S’agit-il de témoigner de (mes) constructions internes, pour (me) séduire (moi-même) ? S’agit-il d’être le créateur se créant lui-même, sans ménager de place à l’improvisation, noblesse improvisée oblige ?
Jusqu’à quel point existes-tu déjà, d’Arcy ?
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